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29 novembre 2012 4 29 /11 /novembre /2012 22:59

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Comment gérer le sommeil quand on est tout seul en bateau.

Ou plutôt ma recette à moi.

 

Navigation en solitaire pendant plusieurs jours donc plusieurs nuits, on fait comment pour dormir ?

Ben oui, un petit dodo de temps en temps c'est non seulement utile et agréable mais surtout indispensable.

Alors, ils font comment les navigateurs solitaires ?

Eh bien pas tous pareil.

Il y a les pros de la course au large qui ont étudié leur rythme de sommeil, quand et comment s'endormir pour un sommeil bref et récupérateur. Pour ça, travail avec des médecins et services spécialisés. Ils sont des dormeurs de haut niveau. Ca me ramène en mémoire que j'avais participé, il y a longtemps à Genève, à des recherches sur le sommeil dans un service de psychiatrie, non non, rassurez-vous, je n'étais pas interné. J'arrivais vers 21h et une infirmière me préparait une jolie tresse d'une vingtaine ou d'une trentaine de fils multicolores  qui reliaient autant d'électrodes fixées sur ma tête à un tableau électrique fixé au mur. Petite précision, c'est moi qui envoyais le courant électrique vers le tableau et pas l'inverse... Et de l'autre côté du mur, la salle des machines pour l'enregistrement.

Une fois branché, un petit comprimé de je ne sais quoi (inoffensif, je connaissais le directeur de recherche) et au dodo. Payé pour dormir, et petit déjeuner inclus !

Mais bon, je reviens à mes moutons qu'il faudra bien que je compte.

Ici, pas de préparation pour la nuit avec des petits fils rouge, bleu, vert, jaune, etc... mais en général avec un cordage noir, un jaune et parfois un gris. Plus rarement heureusement avec un autre noir, à bâbord celui-là. Oui, histoire d'avoir une attitude conservatrice, avant d'aller dormir, je réduis la voilure pour être un peu tranquille des fois que le vent fraîchisse pendant la nuit. Bien sûr, la vitesse du bateau s'en ressent mais je ne suis pas pressé. A l'arrivée, il y aura peut-être un blaireau pour me dire : « Quoi, tu as mis tout ce temps pour cette traversée ? Mais qu'est-ce t'as foutu, il avance pas ton bateau ? MOI, ça fait longtemps que je suis arrivé... »

Ce que j'ai foutu ? J'ai dormi...

Ensuite, briefing d'avant nuit avec les équipiers du bord : le radar, l'AIS (système de prévention des collisions) et pilote automatique. Chacun reçoit ses consignes précises et doit faire ce qu'il à faire.

Il me reste à aller me coucher après avoir déterminé où je vais dormir. Mon bateau n'est pas si grand mais j'ai plusieurs lieux possibles, cela dépend de la météo, de l'allure du bateau (de quel côté il reçoit le vent), si la mer est agitée ou non. En fonction de ces critères le choix est important pour la qualité de mon sommeil. Ça peut-être la couchette avant, la cabine arrière, une des banquettes du carré ou, comme la nuit dernière, par terre, si je peux employer cette expression, dans le carré. Après tout, ça vous est certainement déjà arrivé de dormir sur le canapé du salon (je ne vous demande pas de détails sur la raison...), dans la baignoire (là, vous n'avez pas besoin de les donner...) alors que vous avez un lit bien confortable. Dans le bateau c'est donc pareil, il n'y a que les raisons qui sont différentes.

Et pour combien de temps je me glisse sous la couette ? Très variable. Là aussi, pas mal de choses font que ce n'est pas toujours aussi longtemps que je le souhaiterais.

Tout d'abord, ça dépend de la zone dans laquelle je navigue. Près des côtes, zones de fort trafic, zones fréquentées par des bateaux de pêche, là c'est pas vraiment top... 20 à 30 minutes de position horizontale avec interruption plus ou moins longue en fonction des circonstances. Et ça implique de dormir aussi un peu dans la journée pour essayer d'avoir le minimum d'heures de sommeil nécessaires.

En dehors de ces zones, c'est très différent, en principe je mets le réveil pour des tranches de 2 heures. Petit coup d'œil aux instruments et à l'extérieur et si tout va bien, retour dans les plumes pour 2h et ainsi de suite jusqu'à plus sommeil.

Ça, c'est dans l'idéal et ça n'est pas toujours comme cela que ça se passe. Un certain nombre d'évènements peuvent contrarier ce relativement agréable déroulement et ça arrive souvent. Bien sûr il y a les alarmes des instruments qui font leur boulot, même si c'est parfois avec un peu trop de zèle à mon goût. Ça donne vraiment envie d'arrêter le « bibibip, bibibip, bibibip, ... » horripilant du radar qui s'excite par ce qu'il a repéré une vague à peine plus grosse que les centaines d'autres ou un nuage possiblement porteur de pluie, ou bien le « biiiiiiiiiip, biiiiiiip, biiiiiiip, biiiiiiiiip » continu de l'AIS qui m'annonce la présence dans les environs d'un bâtiment généralement beaucoup beaucoup plus gros que Vo Lu Mondu.

Autres aléas, les variations en force et direction du vent qui peuvent obliger à sortir pour régler les voiles ou bien carrément remettre rapidement de l'ordre dans le vrac engendré par un empannage involontaire suite à un violent changement de direction du vent qui en a bien sûr profité pour reprendre du souffle... Pas top, au milieu de la nuit sous la pluie... Plaisance ?

Heureusement, il y a des nuits où il ne se passe rien de particulier, la routine, quoi...

C'est dans ces moments-là que j'aimerais devenir dauphin ou baleine. Non, je ne rêve pas que je nage comme eux, avec aisance, souplesse, perfection, en fait je ne dors qu'à moitié comme eux. Enfin, ce n'est pas tout à fait pareil : ils ont la particularité de ne mettre en sommeil qu'un demi cerveau, un seul hémisphère cérébral, l'autre étant parfaitement en éveil pour une raison majeure: leur respiration n'étant pas automatique comme la notre, ce deuxième hémisphère permet d'assurer cette fonction pour le moins indispensable.

Dans mon sommeil, je sais qu'une partie de mon cerveau reste éveillée pour analyser les sensations perçues, bruits du bateau, grincements, claquements, bruits de l'eau léchant gentiment la coque ou la claquant violemment d'une bonne vague sur le flanc, tempo de la musique marine, le bateau étant la baguette du chef d’orchestre océanique. Toutes ces perceptions me permettent d'évaluer la situation, le comportement du bateau, le réglage des voiles, les modifications de l'environnement. Ça ne donne pas un sommeil parfait, loin de là, mais c'est tout de même récupérateur et c'est ce qui compte.

Et c'est dans ces périodes que j'apprécie parfois qu'il n'y ait pas du tout de vent, mer parfaitement plate et lisse. Le bruit du moteur au ralenti n'est pas trop troublant et là, je dors sur mes deux hémisphères. Comme l'année dernière en revenant des Açores, un sommeil de 12 heures non stop. Même pas entendu le réveil...

Tiens, il y a deux nuits, ça aurait pu être pareil. Mêmes conditions, j'avais bien besoin de repos car la nuit précédente avait été redoutable en matière de récupération avec des vents de force 7 et les vagues en conséquence. Je démarre le moteur et je fonce me mettre en position horizontale, endormissement immédiat. Un sifflement strident me tire de mes profondeurs nocturnes : est-ce un rêve ? Ce n'est pas une des alarmes habituelles que je connais bien, c'est autre chose. J'ouvre un oeil et je vois un voyant rouge flamboyant sur le tableau électrique du moteur : c'est le témoin de température du moteur. Je le stoppe immédiatement. Après un moment de refroidissement, je le redémarre  et constate que l'échappement ne recrache pas d'eau comme il le devrait. Problème de pompe à eau diagnostiqué rapidement. Il est 3h30 et je sors la trousse à outils... Je retournerais me coucher pour terminer mes rêves à 5h...

Ainsi va le sommeil dans la vie du navigateur solitaire, à moins que ce ne soit l'inverse.

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        © Marc Perrussel

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26 novembre 2012 1 26 /11 /novembre /2012 21:12

Les rythmes cubains du Buenavista Social Club qui occupent l'espace aérien du carré de Vo Lu Mondu s'accordent à merveille au balancement de la coque sur cet océan plus pacifique qu'atlantique qui nous porte vers les îles qui ne se rapprochent que très très lentement.

Le départ de Las Palmas s'est fait en fanfare avec une belle et bonne brise portante de 20 à 25 nœuds. Vo Lu Mondu, content de ne plus devoir tirer sur sa laisse terrienne s'en est donné à cœur joie dans des conditions de navigation qu'il n'avait jusqu'alors que trop rarement rencontrées, quelques heures à étirer un beau sillage jamais en dessous de 6,5 nœuds, parfois à plus de 8 nœuds sous grand voile à 2 ris et foc entièrement déroulé, glissades plaisir sous les étoiles. Nous avons bien fait de profiter de ce bel apéritif parce que la recette du plat suivant était accommodé à la douceur pour ce qui concerne le vent et avec quelques épices pour la mer. Donc pas toujours très digeste, du clapot désordonné alors que les voiles ne sont pas appuyées par le souffle qui leur donne leur raison d'exister. Rien de tel pour les centres de l'équilibre dans nos oreilles internes soient pour le moins perturbés, si vous voyez ce que je veux dire... Et comme après chaque retour en mer, s'en suivent 2 à 3 jours de manque d'appétit et d'une certaine apathie. Véronique n'est bien qu'à l'extérieur et moi à l'intérieur, allongé sur la banquette du carré.

Les Canaries sont derrière nous depuis 4 ou 5 jours, je ne sais plus, mais cependant pas très loin, nous avançons lentement, très lentement, souvent entre 2 et 3 nœuds, parfois accompagnés pour quelques heures par le ronron du moteur. Je suis très content de ma nouvelle voile, un grand génois léger, qui nous tire aussi bien qu'elle peut avec ce petit zéphyr dont elle se nourrit aussi goulûment que possible.

Plaisir à chaque fois renouvelé, se retrouver au centre d'un univers ceint par la grand cercle de l'horizon le jour et, la nuit, être le point de convergence de tous les rayons lumineux émis par les innombrables astres célestes. Nous apprécions tous les deux cette situation vraiment mise en valeur par les calmes environnants. C'est le désert océanique qui nous entoure, on est pas vraiment gênés par les voisins. Quoique. La nuit dernière, alors que depuis le départ nous n'avions aperçu qu'un voilier au loin, l'AIS nous a signalé un cargo qui venait droit sur nous, route de collision. Alors que nous trouvions encore à 4 milles nautiques (env. 7 kms), je l'ai appelé avec la radio du bord pour lui demander s'il nous avait bien repéré. Après sa réponse affirmative, nous avons constaté qu'il avait modifié sa course de quelques degrés pour passer suffisamment à l'écart de la notre. Le risque de collision dans ces contrées maritimes est absolument infime mais il existe donc quand même. C'est tout de même incroyable, alors que les routes ici ne sont pas tracées comme des longs rubans entre des lignes blanches et des rangées de platanes, alors que l'espace est quasiment infini, il est tout à fait possible que les 2 points minuscules que représentent 2 embarcations dans cet univers puissent se rencontrer de manière frontale.

Sans vraiment d'appréhension, je me demandais comment je vivrai une cohabitation dans le petit espace de mon île flottante avec une personne quasi inconnue. D'aucun dirait que c'était un pari très risqué de se mettre dans une telle situation, le très grand nombre d'histoires à problème vécues sur différents bateaux lui donnerait sûrement raison. J'y ai mes habitudes de navigation, de nourriture, de musique, d'ordre/désordre, j'y ai mon rythme de vie, je n'ose dire mes horaires. Le mutisme imposé par mon statut de solitaire ne me pose en principe pas de problème. Avec une autre personne à bord, tout peut être plus ou moins chamboulé ; y aura-t-il des grains de sable dans mes roulements bien huilés ? Ou alors, au contraire, cette huile n'en sera que plus fluide ? Décidément l'avenir aura toujours beaucoup de choses à raconter. Après ces quelques jours, alors qu'il n'est maintenant plus possible d'aller sentir, en cas de besoin, si l'air est plus respirable une fois passé le coin de la première rue, tout se passe bien entre les deux inconnus du bord. Pour ce qui est de la navigation et des manœuvres, Véronique, qui est une néo navigatrice, apprend très rapidement, aucune nécessité de répéter les choses plusieurs fois, tout est très vite intégré, c'est très rassurant pour moi.

Nos vies respectives sont relativement indépendantes, elle beaucoup dehors comme je l'ai déjà dit, et moi plutôt dedans bien que je commence à sortir un peu plus. Nous lisons chacun dans notre coin et nous ne parlons pas beaucoup, ni elle ni moi, sauf lors des repas qui se trouvent alors être nos principaux moments d'échange. Nous nous entendons bien et en fait nous ne nous gênons pas, ce qui est déjà très bien. Par ailleurs, nous avons tous deux retrouvé l'appétit et je n'ai jamais aussi bien mangé sur mon bateau, ce que, vous imaginez bien, j'apprécie au plus haut point.

 

Cinquième jour de mer (j'ai vérifié sur le journal de bord) et les conditions de navigations ont bien changées depuis le milieu de la nuit, elles sont parfaites maintenant. 15-20 noeuds de vent, voiles en ciseaux, vitesse du bateau 5,5-6 nœuds au vent arrière en ligne directe sur le point visé au large des îles du Cap Vert à partir duquel la trajectoire de Vo Lu Mondu deviendra franchement occidentale. Mais nous en sommes encore loin. L'océan est plutôt calme, peu de houle. La surface est parsemée de petites crêtes blanches, comme des blancs moutons en transhumance, nous les accompagnons, nous faisons partie du troupeau. Nul doute que ce soir l'étoile du berger veillera sur nous en compagnie du petit chien et du grand chien depuis leurs constellations célestes.

D'ici quelques heures nous allons couper la ligne du Tropique du Cancer, ça va commencer à sentir bon les cocotiers et le sable chaud. Pour l'instant nous nous contentons des parfums de goyave et d'ananas (pas en boite !) que nous avons à bord.

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Il me semble que la mer, au large, est un monde sans odeur sauf dans le bateau, senteurs de cuisine, des fruits qui se balancent dans leur filet au rythme des vagues et, moins agréable, relents de fond de cale, berk ! Heureusement, je ne vais pas souvent fourrer mon nez dans ces coins-là.

 

Sixième jour avec seulement l'horizon pour limite, décision est prise à l'unanimité des flottants présents de se dérouter vers l'archipel du Cap Vert pour une courte escale. La raison en est simple : l'eau que nous avons pris à Las Palmas a rapidement pris un goût désagréable, Véronique ne la supporte que bouillie et je sens depuis deux ou trois jours que mon appareil digestif ne la tolère que par bonne volonté. Donc arrêt au stand pour une histoire d'eau. Nous en profiterons pour refaire aussi un plein de légumes et fruits, sauf les oranges, je n'ai pas encore ingurgité les vingt cinq kilos. J'ai bien épluché la carte, jusqu'en Martinique, il n'y a aucune fontaine en bord de route à l'ombre d'un chêne, pas plus que de puits dans la cour d'une ferme au bout d'un chemin de traverse. Saint Exupéry disait: « le désert est beau. Ce qui embellit le désert, c'est qu'il cache un puits quelque part. » Il ne parlait sûrement pas d'un désert maritime comme celui qui nous entoure. Il est vrai que ce désert-là, s'il l'a traversé souvent dans son Latécoère de l'Aéropostale, ce n'était pas au ras des flots. Normal qu'il n'est donc pas vérifié si son affirmation valait également à l'ouest du Sahara. On ne lui en tiendra pas rigueur.

L'île que nous visons à partir de maintenant est São Vincente sur laquelle se trouve Mindelo la deuxième plus grande ville de ce petit état. Nous en sommes à environ 300 milles et le détour que cela nous impose ne sera pas très important. Comme le vent se la joue sur un tempo piano piano, il est probable que l'ancre de Vo Lu Mondu ne touchera pas le fond sablonneux du mouillage avant trois jours.


Neuvième jour Atelier couture ce matin : au programme, réalisation du pavillon de courtoisie des îles du Cap Vert. Pour ceux qui ne le sauraient pas, le pavillon de courtoisie fait partie des traditions de la Marine ; c'est un petit drapeau aux couleurs du pays visité que l'on envoie dans le gréement à tribord pour les voiliers et, comme son nom l'indique, est un signe de courtoisie à l'intention du pays hôte. Il est sensé rester en place pendant toute le séjour du bateau. Il y a à bord de Vo Lu Mondu un atlas géographique avec la représentation des drapeaux de tous les pays du monde, une machine à coudre et sa réserve d'aiguilles, du fil et un stock de tissus avec toutes les couleurs de base et la cordelette blanche. Pour notre très futur nouveau pays d'accueil, il faut du bleu, du blanc, du rouge (ça vous rappelle quelque chose ?) et du jaune. Fond bleu 20x30cm, une bande blanche 30x5cm, une bande rouge 30x2cm. Le tout en recto verso et disposé comme il faut. Pas vraiment compliqué à réaliser, bien que la précision soit un peu aléatoire avec les mouvements du bateau. Le plus embêtant étant de découper les dix petites étoiles jaunes représentant le nombre d'îles que compte cet archipel atlantique. Et après le repas de midi (tarte au poireau et lentilles corail accompagnée de tomates au basilic frais), atelier gommettes, ou plutôt comètes, il faut coller les étoiles sur le pavillon, trop petites pour être cousues. Le résultat est acceptable vu les conditions de réalisation; on dira qu'il est loin d'être beau mais qu'il sera beau de loin et c'est ce qui compte finalement vu sa destination finale à six ou sept mètres au dessus du niveau de la mer, que la marée soit haute ou basse.

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Moi j'aime bien réaliser ces petits drapeaux, d'autres se contentent de les acheter, je trouve ça moins poétique. Il me semble que cela participe à l'approche en douceur de ces terres qui se profilent devant l'étrave. En regardant tous ces petits drapeaux dans l'atlas, je me dis qu'il y a certains pays que je n'aborderai pas uniquement parce que le motif à reproduire pour la réalisation du pavillon est trop complexe, en particulier le Bouthan et le Swaziland. Les plus doués en géographie me feront remarquer que ces deux états n'ont pas de frontière maritime et ils auront tout à fait raison. Donc, pas grave, j'irai donc ailleurs, là où il n'y a pas besoin d'avoir de grands talents de dessinateur et de couturier.

Ce matin, Véronique avait piscine, et dans le grand bain s'il vous plaît, plus de 4000m de fond...

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Alors que nous en sommes encore à environ cinquante milles, les îles apparaissent en face de nous, moment toujours intense que cette apparition de la terre après des jours et des jours avec pour seul point fixe l'inaccessible horizon. Même si l'usage du GPS, par sa précision, a enlevé beaucoup de magie à la navigation, plus de sextant, de visée de soleil, d'étoiles ou de lune, plus de tables d'éphémérides accompagnées de savants calculs. Reconnaissons tout de même qu'il a amené une plus grande sécurité, même si une grande prudence est de mise dans son utilisation, ne cédons pas à la facilité qui peut être une fausse et dangereuse amie.

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Dixième jour Nous arrivons en vue de Mindelo en fin de matinée, lentement dans la continuité du rythme de cette traversée. Le comité d'accueil nous a envoyé quelques ambassadeurs dont la venue est toujours autant appréciée.

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Un p'tit jeune s'est bien éclaté en nous gratifiant, dans la mesure de ses précoces moyens, de quelques sauts spectaculaires dont les individus de son espèce (dauphins tachetés de l'Atlantique) sont friands.

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Bienvenus sur les terres de Cesaria, la Diva aux pieds nus, qui continue au dessus de ses îles rocheuses et pointues à chanter et enchanter son peuple. Saudade...

 

 

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22 novembre 2012 4 22 /11 /novembre /2012 21:49


Je me suis toujours dit que je traverserai un jour l’Atlantique en solitaire. Pourquoi en solitaire ? Je ne sais pas trop, je ne me suis pas vraiment posé la question. Peut-être que ça représentait l’Aventure, "l’épreuve" de trois à quatre semaines face à moi-même, être capable d’amener le bateau à bon port "de l’autre côté", comme une ligne importante sur un CV, c’est que ça vous classe le bonhomme quand même une transat en solo.

Je savais qu’aux Canaries, passage quasi obligé sur la route maritime entre l’Europe et les Caraïbes, il y aurait un certain nombre de personnes cherchant un bateau pour traverser cet océan en suivant la course du soleil et que, fatalement, je serai sollicité par des équipiers potentiels.

La question qui ne manquerait pas de m’être posée : « avez-vous besoin d’un équipier ? »

Réponse inévitable : « besoin, non, je me débrouille très bien tout seul. »

Et puis, pendant que Vo Lu Mondu ouvrait son sillage vers l’archipel canarien, l’idée de faire cette traversée en compagnie a fait son chemin et est devenue assez présente dans mes réflexions.

Ça a donné à peu près ça :

-     - non, je n’ai pas besoin de quelqu’un pour faire cette traversée certes longue mais à priori pas difficile. Il faut rejoindre les alizés vers le 20ème parallèle, pas loin des îles du Cap Vert, puis mettre le clignotant à droite pour se laisser porter par ces vents en principe réguliers qui vous amènent directement vers l’arc caribéen.

-     - Impossible d’être certain à cent pour cent qu’une cohabitation avec une personne inconnue (déjà pas gagné avec quelqu’un qu’on connaît très bien) pendant trois semaines minimum sur un petit bateau (et même un grand) se passera dans la plus grande sérénité. C’est qu’on ne peut pas vraiment descendre pour aller faire un tour et s’aérer l’esprit si nécessaire.

-    - J’ai fait du bateau stop une fois à Brest en 1996 (ce n’était pas pour une traversée mais pour un rassemblement de bateaux classiques) et ça a été un immense plaisir de naviguer sur un fantastique bateau historique (1892) plusieurs années de suite et de  rencontrer mon ami Jason, amitié toujours présente aujourd’hui. Et cela grâce à Glen, propriétaire de Marigold, qui a répondu positivement à ma demande d’embarquement comme équipier. Et maintenant, pourquoi ne pas offrir la même chose à quelqu’un ? J’ai un bateau, j’ai de la place, oui je crois que j’aimerais offrir un tel plaisir à quelqu’un. Restera une fois à quai à trouver "la bonne personne".

-    - Si l’idée fait finalement son chemin dans ce sens, je préfère attendre que la bonne opportunité se présente plutôt que de faire une recherche active. Laisser venir et voir…

-    - Je préfèrerais une équipière plutôt qu’un équipier. Les mecs ils savent toujours tout, toujours plus que toi, et je n’ai aucune envie qu’on vienne m’apprendre comment me servir de mon bateau, parce que évidemment je ne sais pas… Donc, aucune exigence de CV nautique, surtout pas !

-     - Et si finalement je ne "sens" pas la bonne opportunité, pas grave, j’ai l’habitude d’être seul sur mon bateau et j’y suis bien.

 

Me voilà donc à Las Palmas. Bateau amarré, formalités d’arrivée faites.

Je suis un peu dans les brumes, la dernière nuit a été peu généreuse en heures de sommeil, et j’ai tellement envie d’une douche.

La serviette sur l’épaule, le savon et le shampoing dans un sac, je longe le quai en direction du bloc sanitaire à quelques centaines de mètres du bateau, passant devant les vitrines des shipchandlers et les terrasses des restaurants. Devant l’un d’eux, je me fais harponner par un serveur qui me vante les qualités et le petit prix de son plat du jour. Je lui dis que les seules choses dont j’ai envie et besoin pour l’instant c’est une bonne douche et ensuite dormir. Il insiste un peu et entame une petite discussion :

-       - tu viens d’où ?

-       - de France (un peu laconique, pas vraiment envie de parler, pas maintenant)

-       - vous êtes combien sur le bateau ?

-       - je suis seul

Et en me prenant d’autorité le bras puis me tirant vers une table de sa terrasse :

-       - viens, il y là une française qui cherche un bateau, tu peux l’emmener avec toi.

Et me voilà devant une certaine Véronique qui aimerait aller en Amérique du sud en bateau.

Bon, la douche d’abord et on verra après.

L’opportunité d’une rencontre a donc été très très rapide.  Reste à savoir si c’est la bonne.

Après avoir fait brièvement connaissance, nous convenons que Véronique vienne s’installer sur le bateau pour une cohabitation au port d’environ une semaine et de faire ensuite le point pour l’éventuelle traversée.

Notre vie commune dans le relativement petit espace de Vo Lu Mondu se passe très bien, pas la moindre anicroche, je sens vraiment un respect réciproque. Nous avons à peu près les mêmes habitudes alimentaires ce qui est un gros avantage sur un bateau et, cerise sur le gâteau, depuis une semaine les odeurs qui s’échappent par le hublot de la cuisine après avoir empli le volume du bateau me font produire des litres de salive.

La semaine a passé rapidement, Véronique à la machine à coudre pour refaire fort bien une housse à la bouée fer à cheval et moi au bricolage pour rendre la cabine arrière un peu plus "finie" pour son confort.

Et d’un commun accord, nous décidons que la traversée se fera à deux avec le sentiment que tout ira bien.

La suite, c’est un plein chariot de supermarché directement livré sur le ponton, puis passage ce matin au marché central pour une grosse commande de fruits et légumes (entre autre, 25 kg des délicieuses oranges canariennes !). Toute cette fraiche "verdure" sera également livrée directement au bateau au dernier moment. Restent à faire la petite formalité de sortie auprès de la police des frontières, le passage à la capitainerie pour payer notre amarrage (ça fait plusieurs jours que nous n’y allons plus parce qu’on nous avait dit de partir et qu’on en avait pas envie) et le plein de gasoil.

Véronique vient de me dire qu’il lui tardait de défaire les nœuds qui retiennent Vo Lu Mondu au ponton, ça tombe bien, moi aussi.

Départ samedi 17 novembre dans l’après midi pour environ 2800 milles nautiques (environ 5200 km) d’eau libre devant l’étrave.

 

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15 novembre 2012 4 15 /11 /novembre /2012 00:12

 

La marina de Las Palmas est vraiment grande, je crois avoir lu quelque part qu’il y a 1250 places. Cependant à mon arrivée on m’annonce qu’il n’y en a aucune disponible, la faute à un grand rallye transatlantique (l’ARC) et ses 250 bateaux, tous plutôt grands, probablement aucun en dessous de 12 mètres, la moyenne doit plutôt tourner autour des 14 mètres. Frais d’inscription de l’ordre de 5000 € paraît-il. Ils partiront en direction de Sainte Lucie aux Antilles le 25 novembre.

Après un peu d’insistance de ma part, j’obtiens quand même une place jusqu’au lendemain mais pas dans le port principal, dans un bassin annexe en général utilisé par les bateaux locaux, lequel bassin est quasiment vide à mon arrivée. Tu parles qu’il n’y a pas de place !

En fait, je m’en rendrais compte plus tard, ce bassin est réservé pour les catamarans qui participent au rallye. Ça fait plus d’une semaine que je suis au même endroit, dans un coin du bassin, et que je vais chaque jour quémander une journée supplémentaire et qu'on me l’accorde. Les choses ont évolué et Vo Lu Mondu est maintenant entouré de catamarans, les plus "petits " mesurant 14 mètres… De là à dire qu’il fait tache dans ce milieu avec ses airs de baroudeur brut de décoffrage, il y a un pas qu’on peut franchir allègrement, ce qui n’est pas pour me déplaire…

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Même si nous ne jouons pas dans la même cour de récréation, j’ai quand même quelques contacts sympas avec certains de mes voisins, en particulier avec une famille avec 2 petits enfants et un petit chien.

Les journées se succèdent à un rythme que je trouve, comme toujours, trop rapide. Je m’occupe en allant au marché chercher fruits et légumes (les oranges locales sont délicieusement douces et tout aussi douces pour le porte-monnaie) et en faisant les petits bricolages toujours nécessaires sur le bateau. Dès que j’ai eu fini la liste des choses à faire avant de partir j’en ai fait une deuxième, je n’ose pas dire seconde, la venue d’une troisième n’étant pas à exclure.

Vous vous demandez peut-être ce qu’il peut bien y avoir sur ces listes qui existent sur pratiquement tous les bateaux. Exemple de ce que j’ai fait hier :

-      - Enfin installé le tuyau et la pomme de douche. Bon, ça ne donne pas de l’eau chaude pour autant mais ça sera tout de même appréciable, je pense, sous les tropiques. Les réservoirs se trouvant sous la ligne de flottaison, l’eau douce sera à la température de la mer, ça devrait aller.

-      - Terminé le support en contreplaqué de l’antenne GPS de l’AIS et mis en place.

-      - Essayé une fois de plus de colmater une infiltration d’eau récalcitrante qui se produit quand les vagues escaladent l’avant du bateau et ça mouille la couchette. Je verrai le résultat plus tard.

-      - Démonté la pompe à eau du moteur pour la bourrer de graisse pour éviter la fuite qui m’a un peu embêté en venant ici, en attendant de changer le joint en Martinique. J’ai fait ça le matin et l’après midi, Patrick, un voisin de bateau m’a dit qu’il avait le même problème sur le même moteur et qu’il avait trouvé les joints adéquats. Donc ce matin, j’ai démonté une fois de plus la pompe et je suis allé chercher les joints, 5 kilomètres à pieds environ, retour en bus quand même. Et cet après midi, remontage de l’ensemble et, miracle, plus de fuite.

- et pour terminer, un petit réglage sur le régulateur d'allure après contact par courriel avec le fabriquant au Québec. Ça pris une petite minute pour résoudre un problème bien embêtant.

Histoire de varier le menu journalier, amoureux des petits félins, je vais régulièrement rendre visite à la colonie de "chats libres", c’est plus joli que "chats errants", qui vivent entre les blocs de béton de la digue du port. Ils sont une soixantaine, paraît-il, et une association s’occupe de les nourrir, les soigner si besoin et les stériliser pour éviter une trop grande prolifération. Et pour ne pas leur faire subir ce traitement deux fois ou plus, le vétérinaire leur coupe une pointe d’oreille pour les différencier. Pas très élégant mais efficace.

Et histoire d’alimenter mon blog "Chat" (http://feliscatus.over-blog.com), je fais des dizaines de photos de petits félins pas si domestiques que ça, la plupart sont très méfiants et restent à distance respectable. Je n’ai pu en caresser qu’un seul.

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Autre occupation indispensable, trouver un endroit avec une connexion internet correcte. Le réseau de la marina fonctionne bien mais le bateau est trop loin pour capter un signal suffisant. Quand je dis indispensable, ça l’est vraiment pour tout voyageur actuel. Ils ne doivent vraiment pas être nombreux ceux qui se promènent sur la planète sans ordinateur ou iPad. Internet a révolutionné le voyage, entre autre. Mon ordinateur, c’est mon lien avec le reste du monde, ma famille, mes amis, vous les lecteurs de ce blog. De nos jours, on cherche une connexion pour avoir ses courriels alors que je me rappelle qu’il y a une vingtaine d’années je cherchais la poste principale à Sydney, Dakar ou Papeete pour trouver mon courrier en poste restante. Et là, deux scénarios possibles : soit il n’y avait pas les lettres tellement espérées et la déception était souvent cruelle, soit une belle pile d’enveloppes timbrées vous attendait, le vrai bonheur, et vous vous retrouviez sur le premier banc public à proximité à vous demander par laquelle de ces merveilles manuscrites  bordées de bleu et de rouge du courrier par avion vous alliez commencer le délice de la lecture. La saveur était infiniment plus intense que la consultation de quelques lignes électroniques même si celles-ci sont aussi très appréciées, après avoir mis à la poubelle les éléments indésirables. Les temps changent, tout évolue.

 

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8 novembre 2012 4 08 /11 /novembre /2012 09:05

Le temps passe tellement vite…

Déjà deux semaines depuis mon départ et me voilà arrivé à l’escale prévue, Las Palmas sur l’île de Gran Canaria.

Avant de vous faire un petit résumé sur ce trajet maritime, un petit mot pour remercier tous ceux qui m’ont envoyé un commentaire sur le blog après la parution de l‘article sur mon départ. Je les ai trouvés aujourd’hui en arrivant et ça m’a fait très très plaisir. Je retrouve mes habituées fidèles de longue date, Françoise, Pascale, Marie, et aussi mes nouvelles chouettes voisines périgourdines, Nadine et Caty, et je n’oublie bien sûr pas tous les autres. 1000 mercis à tous et toutes.

Donc petit résumé de ces quatorze jours en mer. C’est mon plus long trajet en distance (1468 milles nautiques,  soit 2720 kms) mais c’est un jour de moins que mon retour laborieux des Açores l’année dernière. Autant celui-ci m’avait paru interminable du fait du manque de coopération persistant d’Eole, autant celui-là a passé relativement vite, surtout la première semaine avec des vents parfaits en force et direction. La deuxième semaine, c’est une autre histoire.

 

Jour 1 : Pas de vent, c’était prévu, mais apparemment, d’après les prévisions météo, le bon moment pour partir traverser ce Golfe de Gascogne que les navigateurs n’apprécient pas vraiment tellement il peut être mauvais quand une dépression qui vient de traverser tout l’océan vous tombe dessus. J’en ai eu un sérieux aperçu l’année dernière et, non merci, je ne tiens pas, mais alors pas du tout à me resservir de ce plat-là. Sortie de l’estuaire de la Gironde avec la marée descendante, mais la rencontre du courant qui m’emporte vers le large avec la houle qui rencontre les hauts fonds sablonneux  fait que je me retrouve à naviguer dans une grande marmite qui bouillonne et Vo Lu Mondu se met à danser sur un drôle de tempo, pas très académique, je pense, et… nooon, j’veux pas être malade, pas déjà, pas tout de suite, je ne suis même pas encore vraiment en mer, l’eau doit être encore un peu douce (bon, c’est vrai que je suis à la base un marin d’eau douce), je sais que je vais avoir le mal de mer tôt ou tard, mais là c’est vraiment trop tôt. Et… les poissons ont été déçus, ils me suivaient déjà les charognards, je ne leur ai pas donné mon déjeuner en cours de digestion.

Bon, je suis resté un peu vaseux trois ou quatre jours mais, non, je n’ai pas été malade. Je ne m’en plains bien sûr pas comme vous pouvez imaginer.

La première nuit a été assez magique,  bienvenu au paradis des navigateurs (mis à part le manque de vent) : surface océanique absolument sans le moindre relief,  un ciel incroyablement étoilé comme je n’en avais jamais vu sous nos latitudes,  navigation sous une coupole de milliers de diamants scintillant de tous leurs éclats, plein les mirettes…, et dans le sillage du bateau, comme sortant de sous la carène, du plancton phosphorescent  qui faisait ressembler mon bateau à une comète avec son panache étincelant. (j’écrit comète et pas étoile filante parce qu’il faut bien rester réaliste,  Vo Lu Mondu est un bon bateau mais de là à prétendre qu’il « file »… Vous trouvez pas que comète ça donne une impression de moins rapide ?)

 

Jour 2 :  Une chose que je ne m’explique pas : alors que je suis la plupart du temps dans le bateau, pourquoi faut-il qu’à un certain moment  je sorte alors que la marche du bateau ne me le demande pas et que c’est précisément à cet instant qu’apparait un aileron fendant la surface bleu marine à quelque distance du bateau? Cette fois pas de doute, vu la forme arrondie de l’aileron, c’est un globicéphale.  Et quelques minutes plus tard ils seront une dizaine à nous accompagner Vo Lu Mondu et  moi. Le « phénomène » se reproduira quelques jours plus tard avec des dauphins.

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Bon, il y a peut-être des tas d’autres fois où je ne sors pas alors que je suis entouré de baleines et autres cachalots… ça me rappelle une fois, en Suède, où je suis sorti parce que je me suis senti comme observé et de me rendre compte que le bateau passait à environ cinq mètres d’un phoque qui me regardait passer comme l’aurait fait une vache avec un train.  

Autre visite en ce deuxième jour alors que je suis à 250 kms des côtes,  un  petit oiseau, à peine plus gros qu’une mésange, posé là, sur la capote, aussi surpris que moi lorsque nos regards se sont croisés.  Il a trouvé sur ce perchoir flottant un support pour se reposer et quelques grains de riz à se mettre sous le bec puis à fini par reprendre les airs ce qui est, avouez-le, une place plus naturelle pour ce genre d’animal. J’aurais bien aimé qu’il reste plus longtemps, ça a du bon la compagnie… Quelques jours plus tard j’aurai également la visite d’un de ses congénères mais celui-là a visité l’intérieur du bateau. Peut-être était-ce le même…

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Jour 4 : Une nuit sans vent, bien dormi. Au matin, un vent de force 3-4, une mer totalement désordonnée, inconfort maxi et toujours pas malade. Je suis content et soulagé, je suis sorti du golfe de Gascogne, il m’ a laissé passé tout tranquillement avec des bonnes conditions de vent. C’était vraiment la bonne fenêtre météo par laquelle je me suis glissé.

 

Jour 5 : Nuit pas top, je suis à la pointe nord-ouest de l’Espagne, il y a beaucoup de trafic, et du gros : cargos, tankers, etc… Faut que les surveille, je leur laisse toutes priorités, la loi du plus fort.

Mauvaise nouvelle ce matin, j’ai fouillé dans tous les coffres, je n’ai que trois boites d’ananas, la cata ! Trois boites pour deux semaines, sûr que le syndrome de manque va me guetter. Faut vous dire que, contrairement à la moitié de la population mondiale, je ne suis pas né dans un chou mais dans un plan d’ananas. Probablement parce qu’en Côte d’Ivoire ça pousse mieux que les choux. Trois boites !!! Faudra faire avec, se rationner et faire des choix : pamplemousses (ils se conservent longtemps mais je n’en ai pas tant que ça) ou ananas mais pas les deux le même jour. Même pas drôle… Bon, pour compenser, ce soir je vais regarder deux films de suite.

 

Jour 6 :  Coup de vent en court, force 6 à 7 et creux de 4 à 5 mètres, Vo Lu Mondu se comporte très bien au vent arrière sous grand voile à trois ris et foc roulé au trois quart et tangoné. Le bateau laisse un joli sillage d’écume en surfant sur les vagues avec des pointes à plus de 10 nœuds.

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Quand le vent sera établi à 35 nœuds, grand voile affalée complètement et j’avance juste avec la trinquette. Je suis à ce moment au niveau de Porto. J’ai regardé ce soir Indiana Jones, besoin de distraction dans ces conditions de navigations qui sont toujours un peu stressantes. Je venais juste de m’endormir profondément quand j’ai eu un réveil pour le moins brutal et éminemment désagréable : vu que pas mal de vagues passaient sur le bateau, j’avais bien sûr fermé tous les hublots et les aérateurs, histoire de rester au sec. Tous les aérateurs ? Non, tous sauf deux, qui se trouvent très bien protégés dans les hiloires du cockpit, jamais une goutte d’eau n’est entrée par là. Bref, je dormais très bien et j’ai reçu de manière plus que soudaine un bon litre d’eau en plein sur la tête. Pas 10 cm à droite ou à gauche, non, en pleine poire !!! Trempé, fraîche et salée, d’autant plus qu’elle était totalement inattendue. J’ai fini la nuit sur la banquette, sèche celle-là. Pas dormi pour autant, un peu secoué aussi par la douche non désirée et les vagues totalement désordonnées qui secouaient le bateau.

 

Jour 7 : Le vent et la mer ont fini par se fatiguer un peu et ont donc bien baisser d’intensité, pas plus mal. Deuxième bonne nouvelle du jour, j’ai retrouvé une boite d’ananas, entre les petits pois carotte et le maïs.

En fin de journée, Eole et Thalassa se reposent, donc le moteur prend la relève si je veux quand même poursuivre ma route.

 

Jour 8 : A 3 heures, réveillé par une alarme sonore inhabituelle que je n’arrive pas à identifier sur l’instant. Je bondis de la couchette quand je réalise que c’est celle de température du moteur. Je le stoppe immédiatement le diagnostique est vite fait : rotor de pompe à eau H.S.  Comme la mer est parfaitement calme (qui sait comment elle sera demain ?), je sors la trousse à outils en pleine nuit pour réparer. J’ai la pièce de rechange donc il n’y qu’à s’y mettre. A 5 heures le moteur se réveille et moi je m’endors.

Il me semble que j’ai trouvé mon rythme de vie après une semaine. J’ai retrouvé de l’appétit et donc je cuisine plus, même si probablement mes préparations restent du niveau école préparatoire de la première année d’école hôtelière et encore en beaucoup moins académique, voire pas académique du tout. Mais au moins j’apprécie ce que je cuisine et ça nourrit le bonhomme, ce qui au fond est quand même le but de la chose.

Pour la nourriture comme pour le sommeil, c’est quand le besoin s’en fait sentir et pas en fonction de l’heure. Au fait quelle heure est-il ? "7 heures du matin peut être. Je n'ai plus l'heure et je m'en moque." Paul-Emile Victor. J’en suis à ce point-là.  De plus, c’est l’avantage du solitaire, vivre dans le présent, dans l’instant, le seul futur est un futur à court terme, les 24h du bulletin météo. Après, c’est après, je verrai bien…

Mon réveil, mon ordinateur et mes instruments électroniques sont restés à l’heure « de chez nous ». Comme je suis déjà bien à l’ouest (au sens premier, je précise ; Quoique…) il fait nuit plus tard et jour plus tard aussi ce qui fait que l’heure n’a plus beaucoup de sens. Mon ordinateur s’est décalé d’une heure, on est passé à l’heure d’hiver ? J’en sais rien et de toute façon je ne vais pas vers l’hiver, je vais au chaud. Alors heure d’hiver, heure légale ou UTC, ça m’est complètement égal et mon réveil me sert uniquement pour me réveiller (noooon, pas possible !) et pour savoir quand mes pommes de terre sont cuites.

De toutes façons, le temps s’écoule comme l’eau sous la coque de Vo Lu Mondu, les jours passent et je me rapproche de l’escale.

Mon rasoir électrique a disparu dans la tempête, impossible de le retrouver et ce n’est pas faute d’avoir chercher même dans les endroits les plus improbables. Si j’avais un  frigo je serais allé jusqu’à regarder dedans au cas où… Bon, ça m’a permis de voir que j’avais des rasoirs à main, je serai donc à peu près présentable pour les formalités à l’arrivée au premier port.

 

Jour 10 : Dîner spectacle en terrasse ce soir. Alors que je préparais mon repas, comme pour les globicéphales, quelque chose m’appeler dehors et j’ai vu un dauphin traverser la surface bleu acier de l’océan pour effectuer un formidable saut avec comme un temps d’arrêt au sommet de sa parabole, marionnette suspendue à son fil. Magnifique ! Et il en rajoute une couche.

Il est rapidement rejoint par quelques uns de ses semblables et, comme souvent pour ne pas dire toujours ils se sont donnés rendez-vous juste devant l’étrave pour zigzaguer devant le bateau. Après être retourné à mes préparations culinaires, repas en terrasse comme annoncé pour admirer les évolutions des ces animaux fabuleux, ils sont maintenant un trentaine à tourner autour du bateau. Ce sont des dauphins tachetés, surtout des jeunes qui ont la singulière particularité de ne pas avoir de taches… En fait les taches apparaissent avec l’âge et seuls les adultes en sont pourvus. J’ai fini mon repas dans l’obscurité, sous la pluie, trempé, les organisateurs n’avaient pas tout prévu. Le menu du soir ? Je ne sais plus, je me rappelle seulement que les dernières bouchées étaient froides mais l’important était ailleurs.

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Jour 11 : Pas de vent. No comment !

 

Jour 12 : Mon cap idéal est au 205, sud sud ouest. Et le vent il vient d’où ?  Que celui ou celle qui a dit 205 lève la main. Bingo ! C’est gagné. Conséquence, faut aller contre le vent, au près ce qui n’est jamais réjouissant. Comme on ne peut pas aller directement face au vent, il faut tirer des bords et on dit que ça donne 2 fois la distance à faire et trois fois le temps. Ok, ça c’est peut-être à peu près valable avec une embarcation qui remonte bien au vent mais pas avec ce type de bateau de voyage avec peu de tirant d’eau et surtout très large (Vo Lu Mondu fait 4 mètres de large), surtout quand le vent prend des tours pour arriver bientôt aux 30 nœuds. Le résultat ? Je navigue vite mais très loin de l’axe du vent (environ 60° d’écart), je fais pas mal de chemin pour ne pratiquement rien gagner vers le but. Sans parler de l’inconfort parce que qui dit 30 nœuds de vent dit vagues en conséquence. Donc chaque mille gagné dans la bonne direction est tout à la fois un pensum et une victoire, mais surtout un pensum. Au bout de quelques heures à ce régime indigeste, je craque, enroule foc et trinquette et mets le moteur, cap au 205 (youpiiiie !!!), j’avance à 2 nœuds mais dans la bonne direction. Pas rapide du tout mais c’est tout bénef.

 

Jour 13 : Le vent a disparu et, pour une fois, je ne m’en plains pas du tout. Le pilote automatique fait une fixation sur le 205, tant mieux, et ni vent ni vagues la vitesse s’en ressent , 4 nœuds, je ne cherche pas aller plus vite, le moteur tourne à bas régime et consomme peu. Et je viens de détecter une fuite à la pompe à eau du moteur, pas très importante mais il faudra régler le problème à l’escale.

 

Jour 14 et dernier jour : arrivé à 11h30 après avoir ralenti pendant la nuit pour arriver près de l’île Gran Canaria avec la lumière du jour. Toujours délicat d’arriver dans la pénombre, on ne voit pas trop où on met les pieds du bateau. Au matin les nuages sont très bas et je ne vois aucun des hauts pics volcaniques caractéristiques de ces îles, Tenerife, Lanzarote, Fuerteventura.

Bien content d’être arrivé, mon plus grand voyage, et deux envies : une douche et dormir.

 

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         © Marc Perrussel

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22 octobre 2012 1 22 /10 /octobre /2012 12:33

Eh voilà ce qui arrive quand on est accro, on y retourne.

J'espère que vous serez encore derrière l'écran, depuis le temps que ce blog est en sommeil.

VoLuMondu tout propre, ce n'était pas un luxe, remis à l'eau il y a deux heures, tout est prêt, moi aussi, D236429départ imminent, dès que j'aurai fini d'écrire ces quelques mots.

La destination ? Fini les eaux nordiques, direction le soleil des Canaries dans un premier temps puis traversée de la grande baignoire bleue pour un Noël dans la chaleur des Caraïbes, en Martinique plus précisément. Pas mal comme programme, non ?

Grande nouveauté sur le blog, vous pouvez me suivre quasiment en temps réel (position actualisée toutes les 8 heures). Pour cela, regardez dans la colonne de droite, case "où suis-je" et cliquez sur "link".

Pffff ! Big brother is watching me...

Comme on ne change pas un bon programme, vous ne savez pas quoi ? Pas un souffle de vent. J'espère qu'Eole m'a pardonné les mots pas très sympas que j'ai écrits sur lui dans un de mes derniers articles. Je ne lui en veux plus depuis.

A bientôt.

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24 décembre 2011 6 24 /12 /décembre /2011 22:19

PhotoMarcDauphinVoeux

           © Marc Perrussel

 

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11 décembre 2011 7 11 /12 /décembre /2011 21:55

Immense tristesse.

Baltic est partie. De son regard profond elle continuera à regarder le monde...

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        © Marc Perrussel

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7 décembre 2011 3 07 /12 /décembre /2011 11:40

déjà 3 ans...  Fin de journée sur le canal de L'Est.

 

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                                          © Marc Perrussel

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11 septembre 2011 7 11 /09 /septembre /2011 15:49

Promenade sur le quai du port d'Horta.

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                               © Marc Perrussel

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"Seulement après que le dernier arbre a été coupé,
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"La vie c'est le truc qui passe pendant qu'on multiplie les projets."
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"Passer sa vie à cheminer le long d'une route droite, profondément encaissée entre de hauts talus, est faire médiocre usage des jours que le destin nous a accordés, tandis qu'ils peuvent être ensoleillés si l'on grimpe le talus pour flâner en liberté sur le vaste plateau qui le surmonte."
Alexandra David-Neel
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"7 heures du matin peut être. Je n'ai plus l'heure et je m'en moque."
Paul-Emile Victor
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"La seule chose dont on soit sûr à l'avance de l'échec, est celle que l'on ne tente pas."
Paul-Emile Victor
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"Je ne vois pas de délégation de nos Frères à quatre pattes.
Je ne vois pas de siège pour les Aigles.
Nous oublions et nous nous croyons supérieurs.
Mais nous ne sommes en fin de compte rien de plus qu'une partie de la Création. Et nous devons réfléchir pour comprendre où nous sommes situés.
Nous sommes quelque part entre la montagne et la fourmi.
Quelque part et seulement là comme une partie et parcelle de la Création."
Oren Lyons Iroquois Onondaga.
Extrait d'un appel aux organisations non gouvernementales des Nations Unies - Genève - Suisse - 1977.

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"La nature est lente mais sûre.
Elle ne travaille pas plus vite qu'elle n'a besoin de le faire.
Elle est la tortue qui remporte la course de la  persévérance."                                                                                                 

Henry David Thoreau
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"C'est une triste chose de penser que la nature parle et que le genre humain n'écoute pas."
Victor Hugo
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"Qu'est-ce qu'en général qu'un voyageur ? C'est un homme qui s'en va chercher un bout de conversation au bout du monde."
Barbay d'Aurevilly
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" Faites ce que vous êtes capables d'effectuer ou croyez pouvoir faire. L'audace est porteuse de génie, de pouvoir et de magie."
Goethe

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"Si la cruauté humaine s'est tant exercée contre l'homme, c'est trop souvent qu'elle s'était fait la main sur les animaux. Tout homme qui chasse s'endurcit pour la guerre."
Marguerite Yourcenar
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"Il faut sauver les condors. Pas tellement parce que nous avons besoin des condors, mais parce que nous avons besoin de développer les qualités humaines pour les sauver. Car ce seront celles-là mêmes dont nous aurons besoin pour nous sauver nous-mêmes."
Mac Millan, ornithologue du XIXe siècle
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